Modifions le statut juridique de l'animal
Au même titre qu'une chaise ou une étagère, les animaux appartiennent à la grande famille des "choses" dans le Code civil français. Vrai casse-tête pour les juristes, cette situation a fait l'objet d'un appel de 24 intellectuels, demandant la révision de ce statut juridique. David Chauvet, membre fondateur de l'association "Droits des animaux", les soutient.
Le récent appel d'intellectuels, relayé par la Fondation 30 millions d'amis, en faveur d'une modification du statut juridique de l'animal dans le Code civil relance ce débat porté depuis quelques années par les acteurs de la cause animale.
En 2005, un rapport Antoine remis au ministère de la Justice déplorait que les animaux soient considérés comme des choses par le Code civil, en contradiction notamment avec l'article L214-1 du Code rural qui dispose que "Tout animal étant un être sensible doit être placé par son propriétaire dans des conditions compatibles avec les impératifs biologiques de son espèce".
De nombreuses autres normes lui sont en contradiction, comme l'article R.1334-31 du Code de la Santé Publique qui distingue également les animaux des choses, ou des traités européens qui reconnaissent expressement la sensibilité des animaux.
Un problème pour les juristes
Pour le juriste, cela pose un véritable problème de fond. En effet, notre droit est l'héritier de la partition stricte entre personnes et choses qu'avait opérée le droit romain, avec les Institutes de Gaius. Or, cette distinction ne connaît pas de catégorie intermédiaire. Aussi les esclaves furent-ils considérés comme des choses à Rome, et longtemps après, en Occident, jusqu'à l'abolition de l'esclavage. Mais on leur avait aussi reconnu le droit à certains égards, tenant à leur propre intérêt, ce qui est contradictoire avec la notion même de chose ce dont on peut disposer.
Aujourd'hui, les animaux sont dans la même situation que les esclaves à Rome : ni tout à fait des choses, puisqu'ils sont protégés pour eux-mêmes dans une certaine mesure, ni tout à fait des personnes, puisqu'ils ne jouissent pas d'une protection intégrale se manifestant en particulier par le respect de leur intégrité corporelle, c'est-à-dire par un droit à la vie.
Nous sommes très loin d'un tel droit, mais tout aussi loin de l'archaïsme du statut civil actuellement en vigueur. D'où diverses propositions, allant d'une personnalité juridique à celle, moins ambitieuse mais peut-être plus atteignable, de l'extraction de la catégorie des choses pour une nouvelle catégorie créée spécialement pour les animaux.
Hollande doit saisir l'opportunité
Ces propositions ne révolutionneront sans doute pas la condition animale et les auteurs de cet appel en sont bien conscients. Mais cela aura au moins pour mérite, d'un point de vue symbolique, de favoriser une meilleure considération des animaux, en accord avec un sens commun qui sait faire la distinction entre un chien, par exemple, et une chaise.
C'est à cette évidence que s'opposent la FNSEA et la Fédération nationale des chasseurs, fermement opposées à toute reconnaissance du caractère sensible de l'animal. Nous verrons si, face à ces lobbies, François Hollande, qui s'était engagé à accomplir cette réforme, saura faire preuve de constance, ou s'il suivra les traces de son prédécesseur, qui s'y était opposé.
Il lui revient de saisir l'importance de la question animale et l'opportunité de la faire évoluer à moindres frais, puisqu'aucun intérêt économique ne serait dérangé par cet aménagement. D'une certaine manière, la réforme du statut civil de l'animal est aussi une chance pour les politiques.
Pétition en ligne :
http://www.30millionsdamis.fr/agir-pour-les-animaux/petitions/signer-petition/pour-un-nouveau-statut-juridique-de-lanimal-22.html?utm_source=EM&utm_medium=EM-Sign&utm_campaign=Petition